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Transparence architecturale et textile — Du verre de SANAA aux voiles de Dior

  • AMPM
  • 29 août
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : 11 oct.


La promesse de la transparence

Qu’il s’agisse du verre fluide des architectures de SANAA ou des voiles diaphanes de Dior, la transparence traverse aujourd’hui l’art, la mode et le design comme un manifeste silencieux. Elle se déploie dans une transparence architecturale et textile, qui relie les rêves de verre aux chuchotis du tissu.


Chez Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa, fondateurs de l’agence SANAA, le verre n’est pas une simple paroi : il dissout les frontières, brouille la limite entre intérieur et extérieur, et transforme la lumière en matière à part entière. Le Rolex Learning Center à Lausanne ou le New Museum à New York en sont devenus des icônes.


Du côté de la mode, Maria Grazia Chiuri, directrice artistique de Dior jusqu’en mai 2025, a exploré ce même langage à travers des robes de tulle, d’organza ou de dentelle. Plus qu’un vêtement, ses créations deviennent des architectures du corps, jouant du dévoilement et de la suggestion.


Deux disciplines, deux échelles, une obsession commune : donner forme à l’invisible, habiter l’entre-deux. La transparence, loin d’être absence, devient densité fragile et élégance du presque-rien.




SANAA – Transparence et lumière

Chez SANAA, la transparence n’est jamais un effet mais une atmosphère. Depuis la fin des années 1990, Sejima et Nishizawa ont construit un langage architectural où le verre se fait voile, médiateur plutôt que vitrine.


Le Rolex Learning Center (2010) illustre cette approche avec une douceur radicale : une nappe ondulante, percée de patios, enveloppée de parois vitrées qui abolissent la frontière entre dedans et dehors. La transparence ne sépare pas, elle relie.


À New York, le New Museum (2007) adopte une logique différente : empilement de volumes recouverts d’une peau translucide. Loin du gratte-ciel de verre exhibant ses entrailles, SANAA choisit la discrétion. La façade filtre le regard plutôt qu’elle ne l’impose.


Avec Grace Farms (2015), dans le Connecticut, leur langage se fait presque invisible : un ruban de verre serpente au milieu des collines. L’architecture n’ajoute rien, elle se confond avec le paysage.


À travers ces projets, la transparence architecturale devient une esthétique du presque-rien : une manière de faire respirer l’espace, d’offrir à l’œil plus d’air que de matière.




Dior – Les voiles comme manifeste

Si SANAA habite le paysage, Dior habite le corps. Maria Grazia Chiuri, qui a dirigé la maison de 2016 à 2025, a fait de la transparence textile l’un de ses signes les plus puissants.


Dès son premier défilé en 2016, elle a utilisé le tulle et l’organza comme un langage. Ses silhouettes laissaient entrevoir la peau sous des couches superposées, jouant de la suggestion plus que de l’exhibition.


Les collections haute couture 2020 ou printemps-été 2023 en sont des exemples marquants : robes diaphanes, dentelles aériennes, tissus flottant comme des brumes autour du corps. La transparence textile devient architecture intime, espace de liberté.


Cette esthétique, loin d’être décorative, est politique. Elle interroge le regard porté sur le corps féminin et revendique le droit de se montrer sans se livrer totalement. Comme Chiuri l’expliquait dans plusieurs interviews, « la mode doit être un langage d’émancipation ».


Ces voiles fragiles protègent autant qu’ils révèlent. Ils inscrivent le vêtement dans une continuité historique où la couture devient manifeste. Dans cette démarche, Dior rejoint d’autres créateurs (Junya Watanabe, Maison Margiela) mais conserve une dimension profondément féministe et engagée.


Le départ de Chiuri en mai 2025 marque la fin d’une ère. Son héritage est double : avoir réinscrit Dior dans une modernité radicalement engagée, et avoir fait de la transparence une écriture, à la fois poétique et politique.



Transparence comme langage commun

Qu’il s’agisse du verre de SANAA ou des voiles de Dior, la transparence agit comme une zone de tension. Elle ne se contente pas de montrer : elle révèle par fragments, elle construit un espace où le regard circule mais ne possède pas tout.

Dans l’architecture comme dans la mode, cette esthétique engage une réflexion universelle : comment donner forme à l’invisible, comment habiter l’entre-deux ?


SANAA dissout les murs pour laisser entrer le paysage. Dior superpose des voiles pour redéfinir la présence du corps. Les uns et les autres travaillent le seuil, l’intervalle, ce lieu fragile où l’absence devient matière.




L’élégance de l’entre-deux

La transparence, qu’elle soit de verre ou de tissu, n’est jamais neutre. Elle fabrique des espaces subtils où le visible et l’invisible se rencontrent. Ce geste traverse une transparence architecturale et textile, oscillant entre l’imperceptible et le manifeste.


Chez SANAA, elle crée des paysages d’air et de lumière. Chez Dior, elle sculpte des architectures éphémères du corps.


Et dans l’un comme dans l’autre, elle incarne l’élégance du presque-rien : une beauté qui se tient dans l’équilibre instable entre montrer et suggérer, entre révéler et protéger. Une esthétique qui, au-delà de l’architecture et de la mode, inspire aujourd’hui le design, l’art contemporain et même la manière dont nous habitons nos vies.




Crédits : SANAA, Christian Dior

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